Mort du transit et évolution du rôle des points d’échange Internet (IXP) – Rapport de synthèse de l’évènement

Comment le cloud et les réseaux de diffusion de contenu changent-ils les modèles commerciaux? Comment les fournisseurs de transit à l’échelle internationale gèrent-ils la réduction de la capacité de transit ? Comment les points d’échange Internet profitent-ils des opportunités existantes ?

Telles sont quelques-unes des questions discutées au cours du neuvième Sommet virtuel sur le peering, ayant porté notamment sur la mort du transit et l’évolution du rôle des IXP.

Patrick Christian headshot

Patrick Christian, analyste principal chez TeleGeography, a commencé la session par un aperçu du déploiement d’infrastructure par les principaux fournisseurs de services et de la croissance exponentielle enregistrée au cours de la dernière décennie, en particulier chez les fournisseurs de services de contenu.

Aujourd’hui, avec l’augmentation du trafic et de la demande dans différents endroits, les centres de données s’étendent loin des marchés matures.

Croissance des centres de données

Entre 2006 et 2015, deux nouveaux centres de données en moyenne ont été mis en place chaque année. Au cours des quatre dernières années, le chiffre de nouvelles régions cloud est passé à 15 par an : 28 en 2019 et 21 l’année dernière, enregistrant une légère baisse à cause de la pandémie de COVID-19.

43 autres sont prévues dans les deux prochaines années, ce qui illustre la demande des fournisseurs de contenu.

En même temps, la demande la plus importante est due à la capacité internationale entre les centres de données, ce qui fait du développement des câbles sous-marins une priorité pour les fournisseurs de contenu.

C’est pourquoi les fournisseurs de contenu comme Google ont investi dans leurs propres réseaux de câbles sous-marins. La construction de réseaux câblés indépendants est considérée comme plus rentable que l’achat de capacités auprès des transporteurs. Cela permet également aux entreprises de mieux contrôler la capacité, l’installation et la gestion des câbles.

À l’échelle mondiale, les réseaux de fournisseurs de contenu représentent 60 % de la bande passante utilisée au niveau international, ce qui est beaucoup plus qu’en 2010. Les fournisseurs de dorsales Internet enregistrent toujours une croissance saine de plus de 22 %, mais elle est éclipsée par celle des fournisseurs de contenu, qui est de 75 % en moyenne.

Selon Geoff Huston, responsable scientifique du Centre d’information des réseaux de l’Asie-Pacifique (APNIC), cette tendance remonte en fait à deux décennies, au temps où les fournisseurs de contenu avaient beaucoup de mal à accéder aux marchés.

Les fournisseurs de contenu ont essayé de négocier avec les transporteurs un partage des revenus, mais ces derniers ont choisi de les facturer à la place. Ils se sont ensuite tournés vers la publicité, et le secteur a explosé.

Grâce à de nouveaux capitaux massifs et à des modèles de revenus stables, les fournisseurs de contenu se passent désormais des intermédiaires en construisant leurs propres câbles.

Contrôle du réseau

Christian Kaufmann, vice-président d’Akamai Technologies, a expliqué que son entreprise avait construit sa propre dorsale il y a quatre ans afin de mieux contrôler son réseau. Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) avaient auparavant le pouvoir arbitraire de facturer les coûts qu’ils voulaient et ne répondaient parfois pas aux exigences en matière de fiabilité et de performance.

Selon Monsieur Kaufmann, le coût du matériel et du déploiement peut constituer la principale limite à l’étendue du réseau. Les entreprises sont avant tout motivées par un retour sur investissement, et un déploiement d’infrastructures doit donc avoir un sens financier.

Mark Tinka, chef de l’ingénierie chez SEACOM, a déclaré que la région, y compris des pays comme le Singapour, la Malaisie et la Thaïlande, avait commencé à enregistrer une utilisation du transit IP (Internet Protocol) alors que de plus en plus d’entreprises de contenu installaient des câbles sous-marins.

Selon Monsieur Tinka, la même chose se produit aujourd’hui et la demande de transit IP vers le continent ne disparaîtra pas. Le trafic IP a toutes les chances de se maintenir, mais pas à ce niveau intercontinental, plutôt à un niveau régional ou national.

L’industrie devrait connaître une croissance beaucoup plus forte, mais en même temps une dévaluation des marges, ce qui signifie un énorme potentiel de consolidation, avec la possibilité de revenir à un ou deux monopoles, et puis tout le processus recommence.

Kyle Spencer du point d’échange Internet ougandais a ajouté que les points d’échange Internet pourraient remplir la même fonction qu’avant l’avènement de l’échange, à savoir acheminer le trafic entre les réseaux et les marchés.

Il ne s’agit peut-être encore que d’une petite part du gâteau dans le monde du contenu, mais cela peut constituer une sorte de contre-pression lorsque les acteurs du contenu deviennent trop agrégés et tentent d’utiliser leur pouvoir.

Edrich De Lange, président d’INX-ZA en Afrique du Sud, a expliqué les difficultés rencontrées pour amener les fournisseurs à faire transiter une partie du trafic par Durban au début de l’échange. Après des discussions et des partenariats avec des acteurs locaux, l’échange est passé d’environ 500 mégaoctets à 20 gigaoctets aujourd’hui aux heures de pointe, uniquement grâce au contenu local.

Mark Tinka a expliqué que les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et les points d’échange Internet n’allaient pas mourir physiquement, mais qu’ils devraient réduire massivement leurs activités en raison de la diminution de leurs marges. Lorsque le modèle traditionnel d’un point d’échange commencera à perdre de son efficacité, d’autres modèles apparaîtront et mettront la pression sur les modèles de points d’échange existants ainsi que sur les nouveaux arrivants pour qu’ils s’adaptent.

Selon Geoff Huston, le monde actuel est régi par des applications qui constituent leurs propres écosystèmes. Les utilisateurs ne se soucient pas particulièrement des plateformes ou de l’infrastructure sur lesquelles les applications fonctionnent, et l’argent suit les applications de la même manière.

Cette demande ouvre la voie à de nouveaux modèles d’entreprise, dans un monde où les applications définissent leur propre connectivité et leurs propres communications, indépendamment de l’IXP, du FAI ou de l’échange local.   

Questions de sondage

1. Comment avez-vous entendu parler de cet événement ?

  • 20 % Médias sociaux
  • 45 % Liste de diffusion
  • 24 % Collègue ou ami
  • 5 % Site Web de l’AfPIF
  • 6 % Autre

2. Pensez-vous que l’évolution de l’industrie de l’Internet aura un impact positif sur la société ?

  • 80 Oui 
  • 6 Non
  • 15 Pas sûr

Menace venue du ciel

La vraie menace actuelle, et il s’agit bien d’une menace qui va s’aggraver, vient d’en haut. Lorsqu’on commence à lancer des milliers d’engins spatiaux à une petite altitude au-dessus de la terre, comme le fait Space X, la concurrence en termes de spectre et de clients ne vient pas du collègue de bureau appliquant le même modèle commercial avec des bases terrestres, la concurrence vient du ciel où, si on peut lancer suffisamment d’engins spatiaux à un coût suffisamment bas, le marché potentiel est de 7 milliards.

Et le leadership dans les infrastructures traditionnelles, pour abandonner les infrastructures traditionnelles ; pour voir ce que les clients recherchent réellement. Insistant sur la manière de passer de cette culture à une nouvelle culture qui apporte plus de valeur aux utilisateurs et leur permet d’être plus pertinents et visibles.